BMJ a écrit : ↑08 nov. 2020, 23:57
Intéressantes, toutes ces infos sur le Liberty Ship ! Merci Jyb! On est tombé sur un spécialiste ! J'ai même cru un moment que je m'étais trompé de forum et retrouvé sur un site de la marine marchande ! Bon qui prends le relais pour l'oscilloscope ? un spécialiste en électronique ? Perso, je me suis arrété en bac +2 ... "Sachant qu'un écran d'oscilloscope est en fait un tube cathodique (à l'époque pas d'écran plats, et encore moins d'appareil de mesure numériques), et au vu des dimensions d'un tube d'oscillo qui mesure 10cm de diametre, la profondeur du tube devait bien être entre 20 et 30cms... il ne nous reste plus qu'à faire une règle de trois pour connaitre approximativement la taille du tube ! qui se prolonge dans la salle des machines ?" Lol.
Plus sérieusement, je ne pense pas que Jacobs lui-même aurait analysé autant de données techniques ! Même si il aimait que tout soit parfait. L'écran de contrôle figurant dans la base secrète de l'album de la Marque Jaune était pure science-fiction...
Laissons un peu de liberté aux auteurs ! et aussi le droit à l'erreur sur quelques millimètres carrés représentant un mât de bateau !
Concernant juste le cargo, il y a plusieurs choses à dire :
- il faut savoir si le cargo type Liberty ship a un rôle important ou non dans l'histoire. S'il ne s'agissait que d'un cargo entraperçu en fond d'image, une fois ou deux, en guise de décor pendant que la Jaguar verte roule sur les quais, je n'aurais rien dit. J'ai tenu à raconter tout ça car on découvre que le Liberty a un rôle non négligeable dans l'histoire. Donc, la solidité de l'histoire dépend de la solidité du choix du navire, et de la solidité de la documentation utilisée pour représenter le bateau au mieux.
- dans une BD réaliste (aux dessins réalistes, j'entends), on s'attend à des décors réalistes. Ainsi, les deux dessinateurs, à tour de rôle, expliquent, dans
Casemate de novembre, le travail qu'ils ont eu en collaboration avec un spécialiste des voitures (nommément cité : Christophe Merlin) pour dessiner justement la Jaguar verte. Laquelle Jaguar verte n'a pas un rôle important dans la BD (du moins, dans les quatre planches publiées dans
Casemate ; on la voit sur l'équivalent d'une planche juste pour transporter Mortimer jusqu'au port). Et les dessinateurs de nous dire qu'elle leur a posé problème, et de nous parler ("
par exemple", dit l'un) des rétroviseurs d'aile, de la taille de la Jaguar qui est basse. Par ailleurs, ils nous parlent aussi des bâtiments architecturaux qu'on voit dans ces pages. Etienne Schréder ajoute : "
Je n'invente rien." Ah bon... Mais quand je vois le Liberty, on pourrait me dire, comme dans le sketch de Fernand Raynaud : "
Pourquoi tu tousses...?" C'est en raison de cette différence de traitement entre la voiture, les bâtiments, et le Liberty ship, que j'ai tenu à faire toutes ces descriptions. Il faut laisser "
un peu de liberté aux auteurs" ? Alors, pourquoi n'ont-ils pas pris quelques libertés avec la voiture, avec les bâtiments...?
- même si dans les détails, un Liberty pose problème (je pense l'avoir démontré, c'est un vrai casse-tête quand on ne s'y connaît pas), il y a quand même des éléments basiques, inamovibles, constitutifs de tout Liberty ship, ce qui fait que le Liberty devrait être, dans ses formes et au niveau de la place de ces éléments, cohérent et identique d'une image à l'autre. Aussi bien cohérent quand on regarde l'extérieur, d'une image à l'autre, que cohérent entre le volume réel des cales d'un Liberty ship, et le volume quand, dans la BD, on visite l'intérieur. Comme je pense l'avoir démontré, l'intérieur du cargo semble deux à trois plus gros que ce qu'il est dans la réalité. Or, c'est un navire en métal, pas en caoutchouc gonflable. Si le laboratoire secret installé à bord est si "
gigantesque" que le dit le dessinateur, un bateau bien plus gros n'aurait-il pas dû être choisi ? Le problème est qu'il n'existait pas beaucoup de plus gros cargos à l'époque... Il faut savoir aussi que la plupart des cargos devaient pouvoir franchir le canal de Panama et le canal de Suez. Or, ces canaux ont une certaine largeur et une certaine profondeur, et, dans le cas de celui de Panama, les écluses sont telles qu'un cargo qui veut y transiter ne doit pas dépasser une certaine largeur (les bateaux capables de franchir le canal de Panama sont classés sous le terme "Panamax" : mot constitué de la contraction de "Panama" et "maximum"). Le plus gros navire français de l'époque, le paquebot (un paquebot, pas un cargo)
Île de France, ne fait "que" 28 mètres de large. Le plus gros cargo français - un cargo, donc - mesure 19 mètres de large. C'est aussi la largeur d'autres gros cargos de l'époque, dans les flottes marchandes des autres grandes nations ; on ne trouvera pas plus large. Or, d'après ce que je vois à l'intérieur du Liberty ship, planche 12 du Cri du Moloch, on se croirait à l'intérieur d'une citerne des supertankers des temps modernes. Y'a un truc...
- enfin, il y a le problème de la couleur, et de l'application des couleurs aux bons endroits.
A ce sujet, il y a aussi une phrase qui me rend perplexe quand le dessinateur dit dans son interview, en parlant des couleurs de l'intérieur du laboratoire, dans le cargo : "
J'aime beaucoup ces bleus, plutôt en harmonie avec une coque en acier qui s'enfonce dans l'eau". Est-ce à dire que, parce que la mer est bleue, l'intérieur du cargo est bleu ?
Pour info, les parois des cales de ce genre de cargos n'étaient pas peintes (pour y mettre en vrac du charbon par exemple...). Quant aux intérieurs du château (lieux de vie, cabines, coursives, lieux de travail, etc.), c'était peint en vert. Car les marins américains aimaient bien cette couleur verte qui leur rappelait la végétation à terre, ça les reposait alors que pendant leurs longs voyages, ils ne voyaient que la mer bleue...