Bonsoir. J’aime bien L’Onde Septimus.
OK, je développe. Dans les reprises, il y a des albums que je préfère à celui-ci : L’affaire Francis Blake, La Machination Voronov, peut-être L’Etrange rendez-vous… et Le serment des 5 Lords, dans une certaine mesure. Mais il faut avouer que tous ces titres m’ont plu, mais auraient pu être les aventures de Dupond et Durand

L’Onde Septimus me semble le plus proche de l’esprit de Jacobs, dans ce mélange politico-science-fictionnesque qu’il appréciait. Et on sent une vraie volonté de Dufaux de respecter les codes de Jacobs. Certes, de manière parfois pataude et inaboutie, mais assez appuyée pour qu’on le salue. Les récitatifs sont souvent ampoulés et superflus (ah, ces futurs, surtout ! « le bobby Carrington n’arrivera jamais… » ; « très vite, il (MacFarlane) succombera sous le nombre » ; « Millovitch fera diligence. Et ainsi, Blake pénètrera dans la sphère »…) On remplace par un présent, et cela devient tout de suite plus digeste.
Je n’ai pas du tout aimé Les Sarcophages du 6ème continent, et ses flash-backs incroyablement longs, ni le Sanctuaire du Gondwana, ni la Malédiction des 30 deniers (malgré un début plutôt pas mal). Je ne veux pas connaître la vie intime et passée des héros ! Le flash-back sur Blake dans Le Serment des 5 Lords est, de ce point de vue, moins gênant. J’espère donc que Dufaux évitera l’écueil dans son prochain essai, en ne nous racontant pas ce qui lie peut-être lady Rowana à Olrik. Ce serait, je pense, une erreur fatale.
Pour en revenir à cette Onde Septimus, certes je n’ai pas tout compris à l’aspect « scientifique » de la chose. Mais j’avoue n’avoir pas compris grand-chose non plus aux élucubrations de Septimus dans la Marque Jaune, ni à celles de Miloch dans S.O.S Météores, par exemple. Certes, le dessin se relâche vers la fin, mais je le préfère au dessin du premier tome du Secret de l’Espadon ! Certes, il y a des pistes qui semblent ne mener nulle part, mais dont on pressent qu’elles sont là pour être expliquées plus tard, et j’aurais préféré un beau tome tout rond, tout fermé sur lui-même… Mais il y a vraiment de très belles scènes, des images qui me restent après avoir refermé le livre. Au premier rang de ces images, la multitude de Septimus, parapluies dressés ! Mais aussi le délire onirique de la bibliothèque virtuelle, voire du salon de Septimus. La colonne qui abrite Orpheus. Les images violentes et expressionnistes des morts qui émaillent l’histoire… Olrik saignant du nez en revenant à lui… la fumerie de Lily Sing… Je n’ai pas trouvées de telles réussites dans les sarcophages, le sanctuaire ou la malédiction.
Et enfin, Olrik signe quand même un beau retour ! Je suis de ceux qui pensent que mieux vaut un album sans Olrik (Le Piège diabolique, Le Serment des 5 Lords), qu’un album avec un Olrik risible (pas besoin de références, hélas, je pense que vous les avez toutes en tête…). Ici enfin, Olrik retrouve enfin de sa superbe. Et j’aime, à la fin, le retrouver enfermé, comme dans d’autres opus jacobsiens. Beau finale. Enfermé pour s’être sacrifié, pas mal pour Olrik. Là encore, on peut craindre que Dufaux ne veuille expliquer en détail comment il a quitté l’hospice… alors qu’on s’en fout !
J’ai trouvé sympa le retour du brave Dick, même s’il ne sert à rien, mais suis plus réservé sur l’apparition de Tintin… Quant à l’évocation du Septimus de Virginia Woolf, c’est amusant car je viens de relire Mrs Dalloway. Septimus Warren Smith (oui, c’est le prénom du bonhomme) y est un ancien soldat de retour du front, et dont le syndrome post-traumatique va culminer en suicide.
Sur le dessin, petit bémol : quelqu’un saurait-il m’expliquer pourquoi les femmes sont si mal dessinées dans les albums de ligne claire ? Lily et Rowana sont inexpressives, avec ces grands yeux ronds et une physionomie de bestiau en comices agricoles ? Je trouve que les femmes de Jacques Martin (Lefranc, Alix…), d’Hergé (Castafiore, femme d’Alcazar) sont aussi plutôt ratées. La ligne claire est-elle l’ennemie de la féminité ?
Bref, on ne tient sans doute pas un chef d’œuvre, mais un bel hommage à Jacobs qui se lit très agréablement et ne s’oublie pas dans les secondes qui suivent, comme quelques uns des albums qui l’ont précédé. C’est mon avis, et je le partage (je ne cèderai pas à la tentation de dire « By Jove ! »), par Jupiter !