Origines de Nasir
Posté : 19 avr. 2012, 17:33
De Nasir, nous ne savons guère de choses…
Mais nous savons avec certitude qu’il est musulman par le double fait qu’il « jure » comme un musulman en utilisant des locutions typiques (par la barbe du Prophète, par Allah, inch Allah, qu’Allah soit loué, Salam, qu’Allah vous protège, etc…) et qu’il a un prénom - Ahmed - également typique des peuples se revendiquant de la religion de l’Islam.
Et se pose la question de son peuple d’appartenance. Mais pour être en mesure d’y répondre, il faut avant tout déterminer les éléments certains qui nous permettent d’avancer un peu dans ce sens…
En tout premier lieu, on se souviendra d’abord que la base de travail de Jacobs pour « fixer » les lieux dans lesquels se situeront les péripéties principales du Secret de l’Espadon furent les nombreux courriers et documents échangés en 1947 entre lui et l’explorateur François Balsan qui avait publié courant 1946 chez Grasset son ouvrage : « Dans le secret du Belouchistan »…
Des descriptions précises de Balsan, Jacobs en tirera les fameux crayonnés des falaises du Makràn sur lesquelles Blake va perdre les documents relatifs à l’Espadon. Des détails et anecdotes des voyages de Balsan, Jacobs tirera nombre de renseignements qu’il utilisera alors pour le M.L.C., pour Nasir, pour Turbàt et autres choses…
Cependant, il faut absolument ignorer la superbe couverture dessinée par le talentueux F. Joubert pour l’édition Marabout Junior de 1954 !!! Sur laquelle on voit un magnifique spécimen de guerrier baloutche dans lequel on pourrait effectivement vouloir reconnaître Nasir… Par contre, le dessin de couverture de l’EO de 1946 est assez différent, mais pourrait assez bien être pertinent, si l’on veut bien adoucir et rajeunir quelque peu les traits durs du guerrier en couverture… Ensuite, dixit Jacobs, le sergent Ahmed Nasir aurait servi au sein du 5ème Bataillon du M.L.C., à un moment donné, non précisé, sous les ordres du capitaine Blake à Bela…
Qu’est-ce donc que ce M.L.C. ou Makràn Levy Corp ?
C’est une véritable armée coloniale composée de soldats « natives » pakistanais (autrement appelés indigènes ou autochtones) appointés/payés (levy) par les Britanniques, commandée par deux officiers anglais à sa tête ; et dont le lieu de stationnement est Turbàt, au Baloutchistân (Sud-Pakistan). Créée en 1911, elle devait servir à l’origine à renforcer l’autorité du Khan de Kalat, et à maintenir la paix sur les frontières.
Ensuite, le Makràn…
Déjà, il faut se souvenir que le nom de Makràn fut remplacé par celui de Baloutchistân sous le règne de Nâder Shâh (1736-1747).
Balouchistân qui est une région aride, désertique, avec des montagnes volcaniques A l’Ouest, il s'étend jusqu'aux montagnes de Bam. Au Nord-est, les monts Sulayman se dressent entre le Balouchistân et le Pendjab. Cette chaîne de montagne en forme d'arc de cercle culmine au pic de Kalifat, à l'est de Quetta. Ces montagnes s'ouvrent sur la plaine de Kacchi, via le col de Bolan, route ancestrale des caravanes reliant le Moyen-Orient au sous-continent indien. De nombreux sites archéologiques très anciens y ont été découverts (civilisation de l'Indus). Au Sud-est, la chaîne de Khirtar s'étend jusqu'au désert de Makràn qui longe la côte de la mer d'Oman. Enfin, à l'Est, la province se termine par le fleuve Indus et la frontière de Karachi, la première capitale pakistanaise.
En outre, le peuplement baloutche s'étend sur le sud-est de l'Iran (Province du Sistan-o-Balouchestan), essentiellement désertique où vivent environ 1 million de Baloutches, ainsi qu'en Afghanistan, dans le sud du pays (100.000), et au Pakistan (28.000).
Pour certains, les Baloutches appartiendraient à l’ethnie irano-aryenne, pour d’autres, ils descendraient de tribus arabes. La majorité des anthropologues s’accordent sur le fait que les Baloutches sont probablement d’origine iranienne. Selon la commission nationale de l’Unesco, la situation géographique, désertique et difficile d’accès du Baloutchistân a permis à ce peuple la préservation d’une identité antique irano-aryenne, expliquant sans doute la ressemblance de la langue baloutche avec les langues iraniennes antiques.
L’ethnie baloutche vit donc essentiellement en Iran, au Pakistan et en Afghanistan. Les Baloutches sont souvent dépeints comme des hommes nobles, accueillants, sincères, courageux, laborieux et guerriers. La rudesse de l’environnement a très vite obligé ce peuple à une vie très simple et parfois ascétique. Ayant appartenu au M.L.C., en temps que sergent, il est donc pratiquement sûr que Nasir est un Baloutche ; à la rigueur, ce pourrait être un Pashtoune, mais ceci n’est pas véritablement cohérent, puisque les Pashtounes vivent bien plus au Nord… (voir la carte)
Pour bien s’en pénétrer, rappelons-nous que les officiers seuls (deux) étaient anglais, et que tous les soldats et leur encadrement étaient d’origine « native », sans exception.
De par ce fait même, il ne peut donc guère être question d’envisager que le sergent Ahmed Nasir puisse être Indien.
Ensuite, également du fait qu’il est de confession musulmane, il serait encore moins crédible de lui faire endosser le « costume » d’un Indien…
Pour parfaire cette affirmation, il suffit de se replonger dans les soubresauts sanglants qu’à connu l’ex-Empire des Indes au lendemain de l’Indépendance des Indes en 1947, et à la partition qui en a résulté.
L’Inde nouvelle, de confession majoritaire Hindouiste, voire brahmanique, refusa catégoriquement d’intégrer tous les habitants qui se revendiquaient de l’Islam.
A un point tel que l’on assista à une série de pogroms, de vendettas sanglantes, de chasses aux « sorcières musulmanes » à travers tout le pays, et que l’on « encouragea » sévèrement, manu militari même, tous ces hommes, femmes et enfants à aller voir chez le voisin musulman nouvellement constitué, le Pakistan occidental (ou le Pakistan oriental, également musulman…), si l’herbe y était plus verte…
« Encouragements » qui se manifestèrent par des répressions sanglantes, donc, mais également et surtout, dès l’Indépendance déclarée, par le transfert forcé de centaines de milliers d’habitants vers le voisin occidental, dans des convois et conditions quasi identiques à ceux qu’ont connus les Juifs en 1941/1945…
De nos jours encore, les quelques ressortissants musulmans qui persistèrent à rester en Indes sont régulièrement soumis à la vindicte d’une fraction de la population.
A partir de cette démonstration évidente, il est donc clairement impossible que Nasir puisse être un Indien et, a fortiori, ait pu être intégré dans les services secrets indiens qui l’auraient fait accéder au grade de lieutenant !
Mais nous savons avec certitude qu’il est musulman par le double fait qu’il « jure » comme un musulman en utilisant des locutions typiques (par la barbe du Prophète, par Allah, inch Allah, qu’Allah soit loué, Salam, qu’Allah vous protège, etc…) et qu’il a un prénom - Ahmed - également typique des peuples se revendiquant de la religion de l’Islam.
Et se pose la question de son peuple d’appartenance. Mais pour être en mesure d’y répondre, il faut avant tout déterminer les éléments certains qui nous permettent d’avancer un peu dans ce sens…
En tout premier lieu, on se souviendra d’abord que la base de travail de Jacobs pour « fixer » les lieux dans lesquels se situeront les péripéties principales du Secret de l’Espadon furent les nombreux courriers et documents échangés en 1947 entre lui et l’explorateur François Balsan qui avait publié courant 1946 chez Grasset son ouvrage : « Dans le secret du Belouchistan »…
Des descriptions précises de Balsan, Jacobs en tirera les fameux crayonnés des falaises du Makràn sur lesquelles Blake va perdre les documents relatifs à l’Espadon. Des détails et anecdotes des voyages de Balsan, Jacobs tirera nombre de renseignements qu’il utilisera alors pour le M.L.C., pour Nasir, pour Turbàt et autres choses…
Cependant, il faut absolument ignorer la superbe couverture dessinée par le talentueux F. Joubert pour l’édition Marabout Junior de 1954 !!! Sur laquelle on voit un magnifique spécimen de guerrier baloutche dans lequel on pourrait effectivement vouloir reconnaître Nasir… Par contre, le dessin de couverture de l’EO de 1946 est assez différent, mais pourrait assez bien être pertinent, si l’on veut bien adoucir et rajeunir quelque peu les traits durs du guerrier en couverture… Ensuite, dixit Jacobs, le sergent Ahmed Nasir aurait servi au sein du 5ème Bataillon du M.L.C., à un moment donné, non précisé, sous les ordres du capitaine Blake à Bela…
Qu’est-ce donc que ce M.L.C. ou Makràn Levy Corp ?
C’est une véritable armée coloniale composée de soldats « natives » pakistanais (autrement appelés indigènes ou autochtones) appointés/payés (levy) par les Britanniques, commandée par deux officiers anglais à sa tête ; et dont le lieu de stationnement est Turbàt, au Baloutchistân (Sud-Pakistan). Créée en 1911, elle devait servir à l’origine à renforcer l’autorité du Khan de Kalat, et à maintenir la paix sur les frontières.
Ensuite, le Makràn…
Déjà, il faut se souvenir que le nom de Makràn fut remplacé par celui de Baloutchistân sous le règne de Nâder Shâh (1736-1747).
Balouchistân qui est une région aride, désertique, avec des montagnes volcaniques A l’Ouest, il s'étend jusqu'aux montagnes de Bam. Au Nord-est, les monts Sulayman se dressent entre le Balouchistân et le Pendjab. Cette chaîne de montagne en forme d'arc de cercle culmine au pic de Kalifat, à l'est de Quetta. Ces montagnes s'ouvrent sur la plaine de Kacchi, via le col de Bolan, route ancestrale des caravanes reliant le Moyen-Orient au sous-continent indien. De nombreux sites archéologiques très anciens y ont été découverts (civilisation de l'Indus). Au Sud-est, la chaîne de Khirtar s'étend jusqu'au désert de Makràn qui longe la côte de la mer d'Oman. Enfin, à l'Est, la province se termine par le fleuve Indus et la frontière de Karachi, la première capitale pakistanaise.
En outre, le peuplement baloutche s'étend sur le sud-est de l'Iran (Province du Sistan-o-Balouchestan), essentiellement désertique où vivent environ 1 million de Baloutches, ainsi qu'en Afghanistan, dans le sud du pays (100.000), et au Pakistan (28.000).
Pour certains, les Baloutches appartiendraient à l’ethnie irano-aryenne, pour d’autres, ils descendraient de tribus arabes. La majorité des anthropologues s’accordent sur le fait que les Baloutches sont probablement d’origine iranienne. Selon la commission nationale de l’Unesco, la situation géographique, désertique et difficile d’accès du Baloutchistân a permis à ce peuple la préservation d’une identité antique irano-aryenne, expliquant sans doute la ressemblance de la langue baloutche avec les langues iraniennes antiques.
L’ethnie baloutche vit donc essentiellement en Iran, au Pakistan et en Afghanistan. Les Baloutches sont souvent dépeints comme des hommes nobles, accueillants, sincères, courageux, laborieux et guerriers. La rudesse de l’environnement a très vite obligé ce peuple à une vie très simple et parfois ascétique. Ayant appartenu au M.L.C., en temps que sergent, il est donc pratiquement sûr que Nasir est un Baloutche ; à la rigueur, ce pourrait être un Pashtoune, mais ceci n’est pas véritablement cohérent, puisque les Pashtounes vivent bien plus au Nord… (voir la carte)
Pour bien s’en pénétrer, rappelons-nous que les officiers seuls (deux) étaient anglais, et que tous les soldats et leur encadrement étaient d’origine « native », sans exception.
De par ce fait même, il ne peut donc guère être question d’envisager que le sergent Ahmed Nasir puisse être Indien.
Ensuite, également du fait qu’il est de confession musulmane, il serait encore moins crédible de lui faire endosser le « costume » d’un Indien…
Pour parfaire cette affirmation, il suffit de se replonger dans les soubresauts sanglants qu’à connu l’ex-Empire des Indes au lendemain de l’Indépendance des Indes en 1947, et à la partition qui en a résulté.
L’Inde nouvelle, de confession majoritaire Hindouiste, voire brahmanique, refusa catégoriquement d’intégrer tous les habitants qui se revendiquaient de l’Islam.
A un point tel que l’on assista à une série de pogroms, de vendettas sanglantes, de chasses aux « sorcières musulmanes » à travers tout le pays, et que l’on « encouragea » sévèrement, manu militari même, tous ces hommes, femmes et enfants à aller voir chez le voisin musulman nouvellement constitué, le Pakistan occidental (ou le Pakistan oriental, également musulman…), si l’herbe y était plus verte…
« Encouragements » qui se manifestèrent par des répressions sanglantes, donc, mais également et surtout, dès l’Indépendance déclarée, par le transfert forcé de centaines de milliers d’habitants vers le voisin occidental, dans des convois et conditions quasi identiques à ceux qu’ont connus les Juifs en 1941/1945…
De nos jours encore, les quelques ressortissants musulmans qui persistèrent à rester en Indes sont régulièrement soumis à la vindicte d’une fraction de la population.
A partir de cette démonstration évidente, il est donc clairement impossible que Nasir puisse être un Indien et, a fortiori, ait pu être intégré dans les services secrets indiens qui l’auraient fait accéder au grade de lieutenant !