Le Dossier des Armes

Scénario : E.P. JACOBS
Dessin : E.P. JACOBS
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Kronos
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Le Dossier des Armes

Message par Kronos »

Les quelques armes que l’on aperçoit dans la Marque jaune…

Au même titre que dans le Mystère de la Grande Pyramide, je peux affirmer aujourd’hui que toutes les armes vues et utilisées dans les autres aventures de Blake et Mortimer que j’ai traitées jusqu’à présent - c'est-à-dire toutes sauf les 3 formules du professeur Sato - ont déjà été largement décrites et détaillées au fil des précédentes Etudes, dont l’ordre d’écriture et de publication m’était propre, n’ayant de ce fait rien à voir avec l’ordre chronologique des aventures auxquelles ces Etudes se rapportent.
Peu importe le vin pourvu qu’on ait l’ivresse, comme disait un célèbre Auteur, car je vais, pour les quelques specimens présents dans cette aventure, reprendre en grande partie ce qui aura déjà été écrit par moi précédemment, en ce qui concerne l’armement – individuel – qui peut être vu dans les planches de notre histoire. Nul doute que vous aurez ainsi droit à des redites, veuillez m’en excuser, mais ceux de mes lecteurs qui n’auront pas eu le plaisir d’acquérir les autres ouvrages dans lesquels je m’efforçais déjà de traiter le monde des armes pourront ainsi en profiter pleinement.

Certes, les armes ne sont pas légion dans cette histoire, par rapport à d’autres, nettement plus pourvues en moyens efficaces de tuer son prochain, comme le Secret de l’Espadon, une véritable mine, ou l’Affaire du collier, aventure postérieure, presque aussi bien « achalandée » ; mais Jacobs nous fait le plaisir de nous faire profiter de quelques exemplaires qui méritent que l’on s’y arrête le temps de quelques pages.

Allons directement à la planche 13, vignette 10, dans laquelle ce brave inspecteur-chef Kendall, promu garde du corps du juge Calvin pour une soirée qui va s’avérer au final mémorable et fort mouvementée !
Un pistolet automatique que nous retrouvons bien vite entre les mains expertes de ce cher professeur Mortimer, en pyjama, réveillé à trois heures du matin, dans l’appartement du 99bis. C’est dans la dernière vignette de la planche 24 que nous le voyons très clairement, mais que l’on va suivre tout au long de la planche sui-vante, qui ne semble guère faire effet sur l’étrange forme noire aux yeux rouges qui a fait irruption au domicile de nos deux héros.
Pistolet que l’on voit ensuite dans la main de Blake qui a bien évidemment le sien ! Et pistolet habituel de toutes les histoires dessinées par Jacobs, que l’on retrouvera, mis entre toutes les mains, en de nombreuses circonstances.

La photo ci-dessus a été prise par René Quittelier, assistant proclamé du Maître !
Et ce cliché sera à la base de vignettes variées et nombreuses…

Je vais donc commencer par cette première arme de poing, un pistolet automatique, de sa véritable appellation, que, pour tous les amateurs, il ne fera bien sûr aucun doute quant à l’arme représentée par Jacobs…
Pistolet dont nous savons tous qu’il en possédait un exemplaire dans sa collection personnelle ; pistolet qu’il va ainsi utiliser à partir du Secret de l’Espadon, et jusqu’aux 3 formules du Professeur Satô ! Le mettant, ainsi que je le disais plus haut, entre toutes les mains, des simples particuliers jusqu’à Scotland Yard et la Police française, sans oublier les forces armées alliées du Secret de l’Espadon, et j’en passe…

Ce pistolet automatique a une longue histoire, puisqu’on le découvre donc dans le Secret de l’Espadon, entre les mains de Blake et de Mortimer, lorsqu’ils sont assiégés dans leur chambre, dans la résidence de Zahan Khan.
Pistolet que nous allons à nouveau retrouver, entre les mains des policiers lors du guet-apens de Limehouse Dock, planche 41, vignette 6, puis de Septimus, à la planche 63 puisqu’il l’aura lui-même emprunté à Mortimer en le faisant prisonnier...

Dans les vignettes où il apparaît, on pourrait, éventuellement, pouvoir l’identifier à première vue comme étant une copie du Colt 1903 issu des ateliers Browning, qui étaient liés à l’Entreprise belge Herstal (F.N.) pour l’exploitation des brevets de cette arme en Europe…
Mais nous sommes sans l’ombre d’un doute en présence d’un pistolet automatique tchèque « C.Z.-27 » parfaitement reconnaissable dans le visuel ci-contre.
A partir de 1924, le pistolet « V.Z.-24 » devint le seul pistolet de l'armée tchécoslovaque, en calibre 9mm Browning (.380 ACP). Le verrouillage de la culasse par canon rotatif, s'il était essentiel au bon fonctionnement du modèle « V.Z.-22 » en calibre 9 mm Parabellum, devenait superflu pour le 9 mm Browning retenu pour le « V.Z.-24 ».
Peu de temps après son arrivée dans la firme C.Z. (Česká Zbrojovka), Frantisek Myska développa le « Modèle 27 » en calibre 7,65 Browning et à culasse non verrouillée. La période de fabrication s'étendra de 1927 à 1951, et près de 500.000 pièces seront produites.

En 1938, au début de l'Occupation allemande du Territoire des Sudètes (région qui recouvrait peu ou prou Bohême, Moravie, Ruthénie et Silésie), à peu près 15.000 « C.Z.-27 » avaient été fabriqués (depuis 1927), essentiellement utilisés par les forces de police et dans le circuit commercial. La police tchécoslovaque fut autorisée à conserver ces armes.
Les Allemands décidèrent de produire ces pistolets pour leur usage. Le nom de l'entreprise devient alors : la BOHMISCHE WAFFENFABRIK A.G. IN PRAG. Les pistolets « V.Z.-24 et V.Z.-27 » produits avant l'occupation allemande, portent la mention « CESKA ZBROJOVKA A. S. V PRAZE » sur le haut de la glissière.
Pour rester dans le « rayon » des armes dites de poing, poursuivons avec le révolver brandi par Mr Steve, le secrétaire de la Rédaction du Daily Mail en se portant au secours de rédacteur en chef, Macomber, planche 11, puis en haut de la 12.

Evidemment, les armes de poing de sont pas nombreuses, surtout à l’export en celle belle Epoque, et nous pourrions a priori être en présence d’un S&W .38 ou d’un Colt. Mais quel Fabricant exactement ?
Car, même si la production de révolvers était déjà pléthorique et variée, je pense que Jacobs a encore une fois privilégié une arme qu’il connaissait « intimement » pour l’avoir utilisée lui-même et, peut-être aussi, en avoir une dans la belle collection d’armes qu’il possédait dans sa maison du « Bois des Pauvres », et dont nous avons plusieurs fois eu des aperçus, bien que fragmentaires.

C’est pourquoi je vais commencer par vous montrer le Smith & Wesson « Model 38 » dont j’ai moi-même conservé un exemplaire démilitarisé…
Entre les deux modèles que je vous propose, vous noterez tout de suite, dans la photo ci-contre, LES différences essentielles qui vous permettent de faire immédiatement votre opinion : le chien apparaît un peu plus courbé vers le bas sur le « Military and Police » que sur le « Model 38 » ; ce qui n’est guère évident comme preuve, mais a priori suffisant si l’on regarde bien le visuel de Jacobs.

Ce qui nous laisse encore l’option des divers modèles de Colt.
Pour avaliser notre choix futur, trois éléments essentiels peuvent nous guider : la forme des ^plaquettes de crosse, le chien, la forme du canon.
A présent, et puisque le visuel de la case 12 vraiment trop petit, qui ne nous donne aucun visibilité sur les plaques de crosse, ne nous autorise pas à privilégier un S.&W. plutôt qu’un Colt, il me faut donc également aborder ce révolver avant de choisir.
Le Colt « New Police Model » est dérivé du Colt « New Pocket Model » dont il conserve la carcasse et le mécanisme tout en étant doté d’une poignée plus longue. Cette arme, qui tire des cartouches Colt de calibre.32 Colt et .32 New police, fut commercialisée de 1897 à 1907, et arma les Polices de nombreux Etats américains au début du Vingtième Siècle. Le Colt « Police Positive » est un dérivé du « New Police Model » établi avec une carcasse plus étoffée (la carcasse « D ») adaptée à la nouvelle cartouche de calibre .38. Le Colt « Police Positive » est doté de la nouvelle sécurité brevetée par George H. Tansley le 4 juillet 1905 sous le numéro 733.692. Cette sécurité appelée par Colt « Positive Lock », comporte une pièce qui s’intercale entre le chien et la carcasse et rend toute percussion impossible si le tireur ne presse pas la détente. Ce dispositif permet d’éliminer tous les départs de coups accidentels liés à une chute de l’arme. Le Modèle « Police Positive » remplaça le « New Police Model » au catalogue Colt dès 1907.
La première version du « Police Positive » en calibre .38 New Police fut produite jusqu’en 1927 ; une seconde version, dotée d’une carcasse modifiée pour laisser plus d’espace entre la poignée et le pontet, sera produite de 1928 à 1947. Plusieurs autres variantes de « Police Positive » seront également commercialisées ; une version de tir sportif en calibre .32, à canon de 6 pouces et dotée d’organes de visée de tir, appelée « Police Positive Target », sera également fabriquée de 1907 à 1943.
La version « Police Positive Special », de son côté, était un « Police Positive », mais avec une carcasse plus longue d’1/4 de pouce afin de pouvoir utiliser les cartouches de .38 special en même temps que celles de 32-20 (complémentairement aux calibres .32 et .38 New Police et leurs alter-ego de chez S&W. ce modèle avec des visées fixes, un talon carré, et était disponible en canon de 4, 5 et 6 pouces. Il fut manufacturé de 1908 à 1970 en trois versions, puis brièvement fabriqué à nouveau en 1995. La lecture du classement est toutefois brouillée par le fait qu’avant l’arrêt de la fabrication du « New Police Model », Colt avait commencé à doter certains de ses revolvers du dispositif de sécurité « Positive » ainsi qu’à en chambrer certains en calibre .38 « Colt Police ».
Ces exemplaires portent à la fois le marquage « New Police Model » sur la carcasse et la mention « Police Positive » du côté droit et, plus tard, du côté gauche du canon, ce qui peut les faire identifier à tort comme des modèles « Police Positive » alors qu’il s’agit de « New Model Police » de transition. Alors que les premiers « New Model Police » portent sur le canon la mention de brevets de 1894 et de 1900, les modèles de transition équipés du « Positive Lock » portent sur le canon la mention du brevet du Tansley de 1905, comme les Colts « Police Positive », ce qui ne fait qu’ajouter à la confusion.

En ce qui concerne le Colt « Official Police », il s’agit d’un revolver muni d’un barillet à six coups, principalement chambré pour la cartouche spéciale .38, et fabriqué par la Colt's Manufacturing Company. Sorti pour la première fois en 1908 sous le nom de Colt « Army Special », ce revolver fut renommé « Colt's Official Police » en 1927 afin de mieux être commercialisé auprès des Forces de l'Ordre.
Il est ainsi devenu l'une des armes des Forces de Police les plus vendues de tous les
Temps, plus particulièrement au cours des Années 1950 pour illustrer l’armement type des agents de la paix. Le « Official Police », en canon de 4 à 6 pouces, et chambré aussi bien en calibre .22 que .32, .38 ou .41 long, fut d’autre part assez largement utilisé par diverses composantes militaires américaines et Alliées pendant la Seconde Guerre mondiale.
Comme vous pouvez le constater, même avec ce visuel trop « flou » les différences entre S&W et Colt sont minimes, sauf au niveau de la tige d’extraction des douilles usagées que nous pouvons clairement voir ; sur le S&W., vous noterez que la tige d’extraction est protégée sur son avant par une espèce de « protection » ou « carénage », alors que sur le Colt, la tige est totalement libre.
C’est bien pourquoi je ne peux raisonnablement m’orienter que vers un modèle Colt à cause de l’absence de « carénage » de cette même tige d’extraction qui n’apparaît pas sur les Colt.
D’un autre côté, on pourrait légitimement se demander pourquoi un sujet britannique privilégierait une arme d’importation, alors qu’il pourrait tout aussi bien brandir un Webley MkI à VI ou un Enflield N°2-MkI qu’il pourrait bien avoir récupéré pendant la dernière guerre, par exemple ?!
Solution qui m’aurait bien plutôt bien plu.

Mais il est par ailleurs est un pistolet-mitrailleur, sommairement appelé « mitraillette », que l’on voit à peine lors de l’assaut de Limehouse Dock (Cf. vignette 6, planche 37).
C’est à n’en pas douter la fameuse Sten dont le nom vient de l'association des noms de ses inventeurs, le major RV Sheffield et HJ Turpin, qui se sont largement inspiré du pistolet-mitrailleur allemand « MP 40 », auquel ils donnent un nom composé des initiales de leurs deux noms, y ajoutant les deux premières lettres de la firme Enfield : S-T-EN.
Le « Sten Mk II » apparaît doté d'un canon en acier enveloppé d'une chemise perforée sur la moitié de sa longueur, d'un magasin latéral permettant d'obturer l'ouverture en l'absence de chargeur, d'une longue culasse prolongée d'une crosse tubulaire en arceau repliable, d'un pontet protégeant la queue de détente, d'un levier d'arme-ment, d'un sélecteur de tir (coup par coup ou rafales) et d'une bretelle de toile.
Simple à utiliser, aisé à produire et d'un coût modique, le P-M « Sten » a été fabriqué, dans ses différentes versions, à près de quatre millions d'exemplaires entre 1941 et 1945 par des arsenaux et des entreprises privées britanniques (comme la Birmingham Small Arms Company Limited ou la B.S.A.), canadiennes et néo-zélandaises.
Le baptême du feu de la « Sten » se déroule à Dieppe en août 1942, aux mains des soldats canadiens, lors de l'Opération « Sledgehammer ». Généralisée dans l’armée britannique à partir de 1944, elle est parachutée en grande quantité aux Résistants en France Libre, du fait de son utilisation des plus simple et d’une maintenance réduite à sa plus simple expression.
Distribué avec parcimonie dans les parachutages de 1943, où il était destiné à doter les équipes de sabotage des réseaux d'action et les groupes francs des mouvements de résistance, le « Sten » a été parachuté en masse après le Débarquement du 6 juin 1944 (près de 200.000 pour la France). Le « Sten » a surtout été employé par les troupes de l'Empire britannique (Britanniques, Canadiens, Australiens, Néo-Zélandais, etc.). Il a été particulièrement apprécié des commandos qui avaient besoin d'une arme compacte à grande puissance et cadence de tir à courte distance. Même les commandos allemands préféraient souvent un « Sten » de prise à leur lourd « MP40 » pourtant plus fiable !
Très efficace à courte portée (surtout jusqu'à 100 m), le P-M. « Sten » fut très populaire auprès grâce à son faible coût, sa taille, son poids et sa facilité de nettoyage ; il pouvait ainsi rivaliser avec les PM allemands.
En revanche, le (ou « la ») « Sten », outre sa fragilité, présentait deux problèmes de fonctionnement : il s'enrayait assez facilement et, une fois armé, il pouvait tirer sans crier gare (si l'arme chutait au sol, elle pouvait vider son chargeur toute seule…).

Il resterait encore une arme à feu qu’il me faut bien répertorier dans cette « galerie », quant à elle aussi assez peu mise en valeur par Jacobs, si ce n’est que le lecteur en a tout de même droit à un râtelier plein dans la vignette 7 de la première planche ! Fusil qui est ressorti en hâte lorsque les évènements des planches 2 et 3 tendent à se précipiter.
Vous l’aurez compris, il s’agit bien du fusil que les Royal Fusiliers portent sur l’épaule durant toute la durée de leur ronde, et que l’on voit en plein en bas de la planche 2 ; lequel semblerait bien être l’arme officielle encore en usage à cette époque d’après les photos que l’on a d’eux.

Quand on sait que le « Lee Enfield » était le fusil de base du fantassin britannique depuis le XIXème Siècle, on n’est pas autrement surpris de le retrouver ici en première ligne.
Créé en 1895 par l'ingénieur J. P. Lee, le fusil de type « Mk 1 » était fabriqué par la Royal Small Arms Factory. Plus de 30 ans de recherches furent nécessaires pour créer le « Lee-Enfield n°4 », évolution du Lee-Enfield « Modèle 1895 » de James Lee qui tirait une balle de 6 mm à haute vélocité, mais qui était cependant difficile à manier sur le champ de bataille en raison de son verrou « droit », qui rendait la recharge ardue.
En 1907 fut créé le Lee-Enfield à chargeur court « Mark II » (en an-lais, « Short Magazine Lee Enfield », ou S.M.L.E.), le modèle « Mark III » le suivant dans les Années 1910. Ces deux fusils à verrou « rotatif » approvisionnés par deux lames-chargeurs à 10 coups, devinrent ainsi les armes réglementaires de l’Armée britannique durant le premier conflit mondial.
Ils étaient appréciés de leurs utilisateurs et craints de leurs ennemis car leur système à verrou très doux permettait à un bon soldat de tirer jusqu’à 15 coups à la minute. En 1928, le S.M.L.E. fut modifié pour donner naissance au « Lee-Enfield n°4 », chambré en calibre .303 britannique, qui ne fut pas produit en grandes quantités jusqu’en 1941, année où il devint à son tour l’arme principale de l’Armée britannique.
Il en sera dérivé plusieurs versions, dont le « SMLE N°4 Mark 1 » qui, introduit dès 1941 dans l'Armée britannique comme arme standard, devint la dotation de base du « Tommy » (et des troupes du Commonwealth), demeurant ensuite en service dans celle-ci après la guerre. Il est encore utilisé dans certains pays (notamment des pays du Commonwealth), par leurs Forces de Réserve ou de Police.

Cet exposé terminera ce court chapitre sur les armes de la Marque jaune.
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