freric a écrit :Lorsque Je lis un album de Juillard, autre que Blake et Mortimer, c'est vraiment un grand de la BD, mais sur la série "Blake & Mortimer", J'ai l'impression qu'il cherche trop à brider son trait pour calquer celui de Jacobs... Il devrait faire un Blake et Mortimer à la Juillard et pas "à la manière de..." (J'ai l'impression de me répéter.)
Quand Je vois un crayonné de Juillard sur Blake et Mortimer, c'est vivant, c'est superbe... qui pour moi perd un peu de sa souplesse lors de l'encrage.
Salutations By-Jovesques à tout le Fort-Homme (haha) après une loooooongue absence...
Après un été pendant lequel, une fois de plus, je n'ai pas pu résister à l'envie de me replonger dans l'oeuvre jacobsienne (et de relire la superbe bio signée Rivière/Mouchard), voilà que moi aussi je découvre des extraits de la nouvelle "aventure" (?!) pondue par Sente/Juillard... Je me FORCE à ne pas lire toute la bonne trentaine de planches dispo sur Iznéo, pour rester "vierge"
à la sortie du bouquin. MAIS, déjà, impossible de ne pas laisser sortir un long cri étranglé : "où est passé le André Juillard virtuose et génial des Sept Vies de l'Epervier, d'Arno ou du Cahier bleu ?!? Car, même si certains décors sont flatteurs, la découverte des planches en noir et blanc me fait râler sérieusement. Ce fantastique dessinateur, orfèvre en matière d'anatomies, de composition, de sobriété dynamique, est parfois méconnaissable dans B & M, et ça s'accentue au fil des épisodes. Sa ligne claire (soi-disant inspirée de la période Marque Jaune de Jacobs, ce qui est un contresens puisqu'après le Mystère de la GP Jacobs a cessé de se mouler dans le carcan hergéen) ressemble de plus en plus à une ligne pauvre, figée ou un peu molle, avec même des maladresses ou attitudes bancales qui ne sont pas dignes de son talent et ne rendent surtout pas justice au perfectionnisme et à l'intensité inoubliable des cases expressionnistes de Jacobs.
Même dans les rares scènes "d'action", les mouvements des personnages n'ont pas le 10ème du dynamisme et de la force que savait leur insuffler EPJ, qui avait pourtant une vision frontale, distanciée et très théatrale des choses...
Je surconfirme (!) aussi le décalage énorme qu'on constate de façon criante entre les crayonnés de Juillard et les versions encrées.
Dès la planche 2, la case 7 montre d'emblée l'étendue du problème, puisqu'on a pu en voir par ailleurs le crayonné : s'éloignant du comptoir du pub, Lawrence a perdu tout dynamisme, la case est terriblement figée... et les 3 cases suivantes sont encore pires, y compris dans l'organisation des rares éléments de décor. Bouhhh, mais qu'est-ce qui se passe ?!?
Heureusement, j'ai aperçu de belles choses en zyeutant d'autres pages... mais très sincèrement, et sans vouloir faire le "fan de base béat d'admiration", Jacobs n'aurait jamais laissé passer de telles vignettes. On y sent soit un manque de recul de la part d'un pourtant très grand auteur aveuglé par une confiance excessive dans la force de son graphisme, soit un zeste de nonchalance, un déficit de vigilance... Tout simplement un manque de passion, d'énergie ?!? Il est vrai que Jacobs était tout entier investi dans son oeuvre, et même obsédé par elle...
Chaque case de l'incroyable Edgar transpire encore de son investissement total. Alors ok, aucun "poursuiveur/repreneur", aussi talentueux soit-il, n'en aura l'intensité et la sincérité extrème. Mais il y a un minimum : les nouveaux auteurs de B & M parlent sans arrêt de "respect des codes" ; mais au-delà de cet aspect finalement assez artificiel, c'est aussi le respect envers un immense créateur, narrateur et illustrateur, que les passionnés que nous sommes espérons voir s'affirmer à chaque nouvel album...
Comme l'a si bien dit André Franquin, Jacobs avait le génie (et la patience !) de créer, lui, des "images inoubliables"... J'aimerais pouvoir en dire autant de ces suites qui nous arrivent désormais à intervalle... (trop ?) régulier ! ...