Dans ses albums relativement récents, les hommages à Hergé (qui sont aussi pour Burns un moyen d'explorer de façon intime des connexions artistiques et psychologiques que lui seul pourrait expliciter), il y en a à la pelle !archibald a écrit : ↑11 janv. 2020, 08:59.../... Charles Burns , j'ai entendu parler de lui dans un forum Tintin . J'ai vu qu'il a pas mal rendu hommage à l’œuvre d'Hergé . .../... Sans pouvoir l'expliquer, quand je regarde certains de ces dessins je repense à Crumb ou Corben. Roy Lichtenstein également.
Et au point de vue scénar ? Qu'en penses-tu ? Six tomes pour Blake Hole, faut que cela se tienne ...
Mais cela peut avoir le défaut de brouiller les pistes pour qui ne connaît pas ce grand créateur fantastique : ce personnage stylisé, portant houppe, qui n'est qu'une incarnation fantasmatique d'un paysage mental en reconstruction - celui de Doug, le personnage principal de la "trilogie" Toxic - La ruche - Calavera (2010/2014) - finit par fausser la perception de son graphisme par ceux qui survolent son oeuvre...
Car son dessin offre avant tout une figuration d'apparence réaliste, où le pinceau chorégraphie avec virtuosité des ombres et des lumières qui s'interpénètrent par la magie de hachures extraordinairement élégantes, souples et maîtrisées. Ce n'est pas un hasard si la couleur est apparue dans ses planches - en aplats bien nets, sans dégradés - en même temps que ce "Doug'Tintin rêvé" : Burns s'est immHergé dans une synthèse très personnelle de ses influences et de ses obsessions. On a donc découvert à cette occasion que, même pour un suppôt du diabolique Underground américain comme lui, la Ligne Claire hergéenne (et jacobsienne aussi, même si c'est moins présent) faisait partie intégrante de ses références.
Je ne pense pas que ce soit le cas chez Robert Crumb(*) et Richard Corben, par exemple ...
(mais sait-on jamais ?!)...
Il y a une exposition Burns au prochain Festival d'Angoulème (cliquer sur l'affiche ci-dessous). Son graphisme "naturel" s'y déploie superbement... mais, une fois de plus, hep, pssst... , quelle influence majeure apparaît quand même au cœur de cette belle image, mmmhhh ??
Oui, Tintin ! Encore ! "Saperlipopette" !
Quant à Blake... euh... "Black Hole", oui, je trouve le scénario formidable. La narration est d'une intensité rare. Les aspects dérangeants et les pas de côté cryptiques n'empêchent pas le suspense et l'émotion de s'installer, autour de jeunes protagonistes vraiment marquants. L'aspect métaphorique [de la propagation épidémique d'une sorte de MST provoquant des mutations] n'est pas lourdingue et la mise en scène a un effet constamment saisissant tout au long des 6 tomes... ou de l'intégrale chez Delcourt que je conseille vivement !
Une fois encore, j'insiste sur ma formule initiale : "cartésiens rigides s'abstenir !".
Comme préalable, il faut aimer sortir des sentiers battus. Il faut aimer le fantastique mais aussi les récits introspectifs, être un peu sensible à une certaine nostalgie 60s/70s, et peut-être aussi... aimer les "films de monstres" - parmi lesquels on trouve autant de chefs-d'oeuvre que de nanars - comme Hollywood a su en produire il y a très, très longtemps !
(Pour la 1ère fois, Burns évoque même directement ces univers cinématographiques dans son nouvel album : "Dédales" - cf couverture page précédente et deux extraits ci-dessous).
(*) A propos de Crumb, une petite "visite guidée"...