Erca a écrit :Thark a écrit :(Ahhhh, je me prends à espérer qu'un jour Juillard puisse s'éclater à faire un One Shot B & M... tout en couleurs directes, genre crayonnés mis en couleurs à l'aquarelle ou aux encres acryliques transparentes... sans encrage "ligne claire"... Pourquoi pas ?).
Où est-ce qu'on signe la pétition ?

Plus sérieusement, et je demande ça à un professionnel, Juillard ne devrait-il pas laisser encrer ses crayonnés par Etienne Schréder, qui a très bien fait cela pour Antoine Aubin ? Ou le résultat aurait-il autant de chances d'être décevant par rapport à ses crayonnés ?
Je vais réagir en deux temps à tes questions et remarques pertinentes !

Pour le fait de déléguer l'encrage à un autre, je te répondrai ultérieurement (il y a beaucoup à dire

, surtout venant d'un dessinateur - comme tu le fais remarquer - ...
Erca a écrit :Sinon, le dessin du golf est... un pur bijou, comme à peu près tout ce que fait Juillard à côté de ses albums. C'est vraiment trop dommage.
Alors là, c'est vraiment l'occasion de citer ici des propos tenus par Juillard lui-même...
Dans le bouquin "
Juillard - une monographie" paru chez Mosquito en 1997, André Juillard parlait déjà de ses... 'difficultés' spécifiques aux contraintes de la BD (

)...
Question des 2 journalistes :
-
"Ce qui est frappant dans vos esquisses, dans certains de vos travaux d'illustrations [.../...], c'est que vous avez un trait plus libre, plus frémissant, plus vibrant... N'avez-vous jamais éprouvé le désir de vous "lâcher" ainsi sur une bande dessinée ? Ce serait peut-être là un véritable renouvellement... "
Réponse de Juillard :
- "
Bien sûr, c'est une envie que j'ai eue. [.../...] Mais le naturel m'a rattrapé. C'est pour cette raison d'ailleurs que je ne pense pas être naturellement doué pour la bande dessinée. J'éprouve un blocage quand dessine pour la BD et ce blocage je ne l'ai pas pour l'illustration. C'est cet enfermement dans les cadres [.../...]. Le fait est que je n'arrive pas à libérer mon trait quand je travaille dans ce registre. Je pense que la façon de travailler que j'ai adoptée depuis le 4ème tome des 7 Vies me conduit encore plus à aller dans le sens du "figé". J'essayer de me soigner, mais je n'y arrive pas ! (rires)."
Plus loin, il dit :
- "
J'ai toujours été habité par un désir forcené de progresser. Je le suis encore car je ne suis toujours pas satisfait de mon travail, que je trouve trop académique, et encore parfois maladroit dans la mise en scène. Je suis horrifié par certains manques de lucidité dans l'instant {
...} que je découvre en général après coup à la relecture."
Ce qui ne l'empêche pas de déclarer aussi, dans le même entretien (et ça prend une saveur toute particulière quand on suit l'évolution actuelle des reprises de Blake & Mortimer...

) :
- "
Il faudrait qu'il y ait des gens jouant plus sérieusement le rôle de directeur artistique ou littéraire. Des gens qui soient capables, quelle que soit votre notoriété, de dire : ce dessin ne va pas, il y a telle ou telle chose qui ne fonctionne pas dans votre récit... Cela manque un peu. Tout le monde y gagnerait, les auteurs comme les lecteurs... et les éditeurs."
Et puis, en fin d'entretien, questionné sur l'évolution de la BD, il nous dit :
-
"D'une part la stabilité du public me rassure... [.../...] D'autre part, ce même public me chagrine par son peu de curiosité pour ce qui sort de la norme, en gros de la BD de loisir, l'évasion, etc... Il me paraît vital que la BD soit variée, multiforme, audacieuse, dérangeante, qu'elle ne se résume pas à ce qu'elle a été et ce qui fait son succès."

Plutôt marrant de lire ces propos, dans la bouche de quelqu'un qui contribue fortement à faire perdurer ce vieil adage, (pénible quand il s'agit de bande dessinée à succès) :
c'est dans les vieux pots qu'on fait la meilleure "soupe"...
.......... ... ... ...