Antoine Aubin ayant jeté l’éponge, Étienne Schréder avait terminé « L’onde Septimus », en laissant Olrik assis sur une chaise demandant l’asile. (Certains lecteurs aussi !)
Lors du vernissage de l’exposition-vente des planches d’Antoine Aubin à la galerie Daniel Maghen, en avril 2014, Jean Dufaux avait fait une apparition juste pour poser devant les photographes et était reparti en disant :
« Je vais manger ».
Interrogé sur ses propres séries, Jean Dufaux a prévenu : il y aura une suite à « L’onde Septimus », car ce qui devait être un contrat d'un album est devenu une trilogie!
En attendant une suite à « L’onde Septimus », le lecteur a eu 4 albums dans les mains (Le bâton de Plutarque, Le testament de William S., et les 2 tomes de La vallée des immortels). Durant ce temps, Aubin propose ses propres scénarios, tous rejetés par l’éditeur… Ce dernier demande à José-Louis Bocquet de lui écrire un Blake et Mortimer et de trouver un dessinateur. Bocquet s’associe à son acolyte Jean-Luc Fromental pour écrire le scénario de « 8 heures à Berlin » et propose Christian Cailleaux à l’éditeur pour illustrer l’histoire. A la lecture du scénario, Antoine Aubin demande à être le dessinateur de ce qui devait être le 27eme album. L’éditeur ne laisse pas tomber Cailleaux et pense à lui pour dessiner la conclusion de « L’onde Septimus », le 30eme album. Pendant que le duo Van Dongen / Berserik dessine le 28eme album, sur un scénario de Jean Van Hamme « Le dernier Espadon » (A paraître en 2021).
Mais Aubin est un perfectionniste et les planches sont en cours d’encrage.
L’année 2020, serait-elle une année sans « Blake et Mortimer » ?
L’éditeur décide d’inverser l’ordre de parution entre l’album d’Aubin et celui du duo Christian Cailleaux/Étienne Schréder.
Pour le scénario, il est demandé à Jean Dufaux de raconter son histoire sur un album de 54 pages et la trilogie voulue par Dufaux, devient un diptyque.
Lors de l’exposition « Scientifiction », début 2020, Étienne Schréder disait espérer tenir le délai pour finir les planches en Juillet 2020.
Le 20 novembre, « L’onde Septimus 2 » rebaptisé « Le cri du Moloch » est dans les rayons des librairies, sans avoir été prépublié au préalable.
Pour le scénario :
Il faut être sûr de soi pour faire une suite à « La Marque jaune ». L’onde Septimus est une adaptation d’un épisode « The Quatermass Experiment ».
En lisant l’album, le lecteur n’est jamais pris à contre-pied et n’est pas étreint par le suspense. L’histoire, cousue de fil blanc, n’emporte pas l’adhésion.
Dans « Le cri du Moloch », la Reine reçoit le capitaine Blake, non pas pour le féliciter de lui avoir rendu sa couronne, mais pour avoir des renseignements sur la destruction du vaisseau, sachant qu’elle n’a aucun pouvoir décisionnaire.
Dans les premières planches, le méchant de l’histoire, le Moloch, casse la vitre de la sphère qui le retient prisonnier… Déjà vu dans « Le cinquième élément ». Quelques pages plus loin, ses compagnons envahisseurs extra-terrestres s’arrêtent dans l’espace avant d’arriver sur terre… comme dans le même film.
Si la Marque jaune contrôlé par le télécéphaloscope signait ses méfaits d’un M, le Moloch écrit abondamment sur les murs. Cette histoire aurait pu s’appeler « Les écrits du Moloch ».
Au niveau dessin :
Christian Cailleaux a dessiné et encré les personnages ; et Étienne Schréder a fait le découpage et les seconds plans.
Il faut l’avouer reprendre un Blake et Mortimer n’est pas facile. Et ce deuxième volume souffre de la comparaison avec les planches d’Aubin, ce dernier faisant un travail de fidélité. Un graphisme plus proche de Jacobs, qui ne perturbe pas le lecteur des premières heures.
Christian Cailleaux dessine à sa manière, dans son style, il ne cherche pas à dessiner à la manière d’un autre. Du coup, à la lecture des premières planches, le lecteur-passionné est désarçonné ; les dessins des protagonistes sont inégaux. Avec Jacobs, les traits de Blake et Mortimer changent à chaque album, là, c’est presque à chaque case. Mais un barbu roux et un grand moustachu en imperméable, cela ne peut être que le professeur ou le capitaine…
Au fil des planches, le dessin gagne en maitrise. Le lecteur s’adapte, ou s’habitue, et les dessins deviennent homogènes.
Curieusement, les planches en trois strips passent mieux que celles en quatre ou cinq.
Pour un premier album, il y a de l’espoir. Surtout dans des conditions de réalisation aussi courte imposées par l’éditeur. Celui-ci annonce la possibilité du retour de ce duo de dessinateurs sur Blake et Mortimer avec un scénario de Fromental & Bocquet.
Laurence Croix a fait un joli travail de recherche sur les couleurs Jacobsiennes.
Le bilan :
Avec les reprises annuelles, on s’éloigne de plus en plus de l’esprit Blake et Mortimer.
Ce qui amène à cette question : « Peut-on reprendre une série après la mort de l’auteur ? »
Un petit garçon avait posé la question à Jacobs:
- Quand vous serez mort, souhaiteriez-vous qu’un dessinateur continue vos aventures ?
- Bah, là… (Rire de Jacobs), écoute, à ce moment-là, il sera toujours temps d’y penser.
Lors de la sortie de L’Affaire Francis Blake, Ted Benoit citait le commentaire d’un collaborateur des Éditions Dargaud : « Ce n’est pas du Jacobs mais c’est bien du Blake et Mortimer ».